
Depuis août 2024, les délais de convocation au guichet unique des demandeurs d’asile pour l’enregistrement des demandes d’asile en préfecture de l’Isère n’ont cessés d’augmenter (13 jours en octobre 2024, 32 jours en décembre, 48 jours en février 2025, 56 jours en mai).
Dans cette période le tribunal administratif a été saisi de 98 référés individuels, et il a quasi systématiquement enjoint à la préfète d’enregistrer la demande dans un délai de 3 jours. Ces 95 ordonnances n’ont presque jamais été exécutées (seule une a été exécutée).
Lors de la réunion du 13 mars 2025 à la préfecture, la préfète a admis ne pas s’être réorganisée depuis août 2024 ce qui a conduit à l’augmentation des délais et qu’il n’était pas possible de se prononcer sur un retour à un respect des délais dans les mois qui venaient, et ce malgré les décisions de justice qui ne cessaient de condamner la préfecture.
C’est contre cette décision d’organisation révélée par cette réunion et par la non-exécution des décisions du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble que plusieurs associations : la Cimade, l’ADA, la LDH, le Gisti et le Secours catholique, ont saisi le tribunal par un recours pour excès de pouvoir puis un référé-suspension.
Par une requête enregistrée le 11 juin 2025, ces associations demandent au juge des référés :
- de suspendre l’exécution de la décision d’organisation de la préfète de l’Isère du guichet unique des demandeurs d’asile (GUDA) de Grenoble conduisant à ne pas respecter le délai légal d’enregistrement des demandes d’asile ;
- d’enjoindre à la préfète de l’Isère de prendre toutes mesures utiles pour que soient respectés les délais d’enregistrement des demandes d’asile fixés à l’article L. 521-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dans un délai d’un mois et sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Voici des extraits de l’ordonnance du juge des référés du 26 juin 2024 qui enjoint à la préfète à prendre des mesures pour revenir au délai de 3 jours dans les deux mois.
« Le délai moyen d’enregistrement des demandes d’asile auprès du guichet unique de la préfecture de l’Isère se situe depuis novembre 2024 largement au-dessus des délais prescrits par les dispositions de l’article L. 521-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Il n’est pas contesté qu’hormis la Guyane, cette situation est propre à la préfecture de l’Isère dont il n’est pas établi qu’elle ferait face à un accroissement récent et significatif du nombre des demandes d’asile. Par ailleurs, compte tenu de l’obligation de résultat prévue par le législateur, la préfète de l’Isère ne peut utilement faire valoir que l’allongement du délai moyen d’enregistrement des demandes d’asile auprès du guichet unique de la préfecture s’explique par les contingences inhérentes au service qui ne sont au demeurant ni précisées ni établies. Dans ces conditions, eu égard au non-respect systémique de l’obligation de résultat prévue par le législateur depuis de nombreux mois, le moyen tiré de ce que la préfète de l’Isère, dont les services sont chargés de l’enregistrement des demandes d’asile, ne pouvait légalement refuser de faire usage de ses pouvoirs en vue d’assurer le respect effectif des délais prescrits par l’article L. 521-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision en litige.
Il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu d’ordonner la suspension de l’exécution de la décision de la préfète de l’Isère,
Dès lors que l’obligation de résultat à laquelle l’Etat est soumis en matière d’enregistrement des demandes d’asile n’est toujours pas satisfaite, au jour de la présente ordonnance en ce qui concerne le guichet unique de la préfecture de l’Isère, l’exécution de celle-ci implique nécessairement qu’il soit enjoint, à titre provisoire, à la préfète de l’Isère de mettre en place les mesures nécessaires pour que soient respectés les délais d’enregistrement des demandes d’asile prescrits par l’article L. 521-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente ordonnance. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’assortir cette injonction d’une astreinte. »
Mots-clefs : droits des étrangers, immigration, justice administrative, préfecture